On dit que tous les Norafs viennent d'un même pays
Et qu'ils ont tous pour histoire les mille et une nuits
Plein de tapis volants de jasmin et de diams
Tout ça peint de la verte couleur de l'Islam
A Sidi Bel Abbés la rue Verte c'est les bordels
Dans les caniveaux y'a du sperme malade qui ruisselle
Qui se mélange au parfum Ploum Ploum
Et à l'alcool à brûler
Que plein de gens boivent, boivent pour oublier
Oublier la chambre où ils habitent à quinze
Oublier ceux qui crèvent doucement
Faute de place à l’hôpital
Et qui n'ont ni piston, ni sécurité sociale
Pour se soigner en France
Dans des cliniques cinq étoiles
Oublier les pénuries
Les queues devant les boulangeries
Pour un kilo de pain
Souvent le repas quotidien
Oublier l'univers où l'éclair du rasoir
Comme une lueur d'espoir fait rêver du départ
Les mille et une nuits c'est pas mon pays
Y'a pas de châteaux y'a pas de boulot
Sinon pourquoi tous ces basanés
Viendraient bouffer le pain des Français
Les belles femmes dans des harems mosaïque
Tout ça c'est bon pour les dépliants touristiques
Et si souvent leur ventre se remuait
C'était de faim qu’il dansait
Il y a des femmes complètement laminées
Par des grossesses trop souvent répétées
Qui envoient leur dernier gosse dans la rue à six mois
Parce qu'il y a un autre qui arrive dans quatre mois
Y'a des gamines qui se violer à quatorze ans
Par des illuminés, prêcheurs d’obscurité
Ou par des militaires, anciens révolutionnaires
Pour une promesse de boulot : un salaire de fonctionnaire
D'autres filles crèvent d'infection.
Parce que un mauvais avortement
Elles ne veulent plus aller à l'hosto.
Elles en ont marre
Du fantôme de la médecine
Des grands frères bulgares
Les mille et une nuits c'est pas mon pays
Y'a pas de harems, y'a pas de je t'aime
Si les filles vendent leur virginité‚
C'est tout ce qu'elles ont à marchander
En Kabylie il y a toutes ces légendes
Qui font rêver d'un oeuf dur ou de viande
D’améliorer‚ le couscous à la farine de glands
Avec un bout de graisse séchée ou un oignon
Y’a pas de palais climatisés !
Y’a ces maisons
Où les humains vivent avec le bétail pour se chauffer
Et moi ça me fait tout drôle et c’est pas drôle
Quand on me traite de fils de roi du pétrole
Pour les rois arabes les Norafs sont des bâtards
Pour les Européens‚ c'est encore moins que des chiens
Parce qu'ils n'arrivent pas avec des pétrodollars
La bouche un coffre fort
Qui déborde de dents en or
Si tous les Norafs débarquaient dans les casinos
De Nice, de Deauville ou de Monaco
On ne les appellerait pas Arabes
Bougnoules ou Bicots
Mais Saoudiens
Ça fait pas sale et ça fait bien
Les mille et une nuit c'est pas mon pays
Y'a pas de châteaux Y'a pas de boulot
Le couscous royal une invention
De ceux à qui le caviar donne des boutons
Mon pays aujourd'hui est livré‚ au F.M.I. :
Front pour la Misère Internationale
Qui fait croire à des généraux que la révolte finit
En important des bananes, des pneus et des fusils
Mon pays aujourd'hui c'est un peuple valise la main
Qui gratte dans son histoire jusqu'au sang
Pour trouver une parenté
Un lien qui le ferait citoyen
De n'importe quelle terre paisible de l'Occident
Mais dans mon pays aussi
Quand on tend l'oreille la nuit,
On entend monter de Bab-el-Oued
Un « chahut de gamins »
Le cri d’une bande de mômes
Tirés en 88 comme des lapins
Par leurs aînés
Vétérans de guerre sur leur déclin
Ces mômes étaient descendus dans les rues d’Alger
Les cartables pleins de crayons de couleur
Ils ont bariolé les murs des cités
De dessins d’enfants
Dessins d’amour et de bonheur :
Des dessins où les hommes transformaient
Les Kalachnikovs en des outils
Pour labourer l’Algérie
Des dessins où les femmes
Répandaient la démocratie
Où mon peuple moissonnait
Des gerbes, de blé, de paix et de vie
Copyright © 1980-1990
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