samedi 1 janvier 2000

Les nègres

Je regarde vers le Sud de mes souvenirs
Vers le soleil de la famine
Vers le soleil des fosses communes
Où s'entassent des Noirs
Morts parce qu'ils sont noirs

Des milliers de nègres crèvent en Ouganda
Les crocodiles sont bien nourris
Dans les bistrots on rit de Idi Amin Dada
Le sang chilien est à la mode à Paris

Des milliers de nègres crèvent en Rhodésie
Tous les best-sellers s'apostrophent
Ils drainent leur négritude dans les fusils
La mort grimpe. Les ventes aussi

Mes larmes vont s'évaporer
Sur la ligne de feu du Dieu Soleil
Où des petits noirs le ventre gonflé
N'attirent même plus la charogne

J'aurais voulu que mes larmes soient abondantes
Pour irriguer ces terres
Pour que la vie revienne
A ces enfants vieux de naissance

Les yeux de ces enfants malades
Sur les affiches dans le métro
Qui mendient la gamelle du prolo
« T'aurait pas un grain de riz en trop ? »

J’aurai beau chialer
Ça ne servira à rien
De toute façon le soleil
Se lèvera encore demain
Sur le Sud de ma mémoire.
Sur ces charniers bidonvilles

Des milliers de blancs crèvent en Occident
D'alcool, d'overdose, d'ennui
Quand l'homme a envie de vivre
On lui enlève les moyens
Quand l'homme a les moyens de vivre
On lui tue l'envie.

Copyright © 1978

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